Au sein de la prépa Architektôn, la dernière semaine de janvier a vu se dérouler un séminaire très particulier qui portait sur le projet du Grand Paris. L’occasion pour les élèves de la prépa de partir en visites sur certains chantiers de cette opération de grande envergure et de se consacrer à un atelier pratique pour comprendre les enjeux de ce projet de développement urbanistique. Bruno Lam Quang, architecte, a animé ce séminaire et revient sur les activités qui ont été mises en place pour les élèves.
Le Grand Paris, c’est quoi exactement ? Pourquoi avoir choisi ce sujet pour animer un séminaire ?
Le Grand Paris est actuellement le plus grand chantier d’Europe. Il doit durer encore plusieurs années et ne sera pas achevé avant 2030 au moins. “C’est un sujet intéressant parce qu’il a donné lieu à un travail individuel et collectif” précise Bruno. “Individuel, parce que chaque élève a pu réfléchir sur les tenants et les aboutissants du projet, et collectif parce qu’une maquette a été réalisée par l’ensemble des élèves et que des visites ont été organisées en groupes.”
Le projet du Grand Paris, c’est le maillage de nouvelles lignes de métro : les lignes 15, 16, 17 et 18. Pourquoi mettre en place un projet d’une telle ampleur ? Tout simplement pour répondre à un diagnostic qui a été posé. Actuellement, certaines communes sont favorisées parce qu’elles sont mieux desservies par les transports que d’autres. On retrouve de grandes inégalités parce que certaines villes ne servent que de cités dortoirs.
L’idée est donc de construire de nouvelles gares, mais aussi de se servir de gares existantes pour relier les banlieues entre elles. Actuellement, le réseau de transports est dessiné et fonctionne de manière radiale entre Paris et la banlieue. On cherche donc à réduire la distance domicile-travail et à désenclaver un certain nombre de communes pour leur donner un statut économico-politique plus affirmé. Tout le projet vise ainsi à densifier chaque croisement pour implanter de nouvelles activités : des logements, des commerces et des services.
Le Grand Paris doit redessiner le maillage actuel, et ce dans une démarche éco-durable. Sont pris en compte le dérèglement climatique et la pollution : on cherche avant tout à améliorer la qualité de vie des usagers. Ainsi, l’accent est mis sur les mobilités vertes : le train, le vélo et les voies piétonnes. Pour l’instant, les voies piétonnes ne relèvent que d’une intention, elles n’ont pas encore été vraiment arrêtées ni votées.
Le programme de formation est pluridisciplinaire et transversal. Il mêle théorie et pratique à travers des ateliers de projet et des sorties sur le terrain. Les étudiants sont amenés à créer et produire des réalisations, gagner en autonomie et en connaissances dans chacun des domaines abordés par la formation.
Ce programme, très complet, leur permet de mûrir leur projet professionnel afin de choisir, à terme, le parcours qui leur correspond le mieux.
Quelles visites ont été organisées pour les élèves ?
Au cours de cette semaine consacrée à l’étude du projet du Grand Paris, les trois classes d’élèves de la prépa Architektôn ont pu prendre part à trois visites différentes. L’idée était que les futurs étudiants en architecture voient différents aspects du Grand Paris dans son développement et sa programmation et qu’il y ait un échange entre eux pour en discuter.
Malheureusement, seules deux visites ont pu réellement avoir lieu :
- à Aulnay-sous-Bois, où est prévu le plus grand nombre de logements. Les élèves ont visité une petite exposition dans l’annexe de la mairie. Celle-ci reprenait les enjeux du Grand Paris, avec un focus sur Aulnay et l’habitat. Bruno a lui-même servi de guide près de l’annexe pour montrer les différentes zones d’urbanisation, leurs époques et les politiques auxquelles elles correspondent.
- à Paris Saclay, pour visiter l’immeuble EDF Lab. Ce gros centre de recherche est la tête pensante d’EDF, avec un accent mis sur l’excellence de la technologie, de la recherche et du développement. Cet immeuble correspond à une vision très technocratique puisque l’idée, à Saclay, est de créer une Silicone Valley. Un guide sur place a accueilli le groupe d’élèves et leur a expliqué l’historique de chaque pièce, leur agencement et fonction etc. Il leur a donné une mini conférence passionnante.
La troisième visite devait avoir lieu à la gare de Saint-Denis. Il s’agit de la deuxième plus grande station après Les Halles. Celle-ci accueille chaque jour 1 million de voyageurs quand la gare de Saint-Denis en voit passer près de 300 000 par jour. Cet énorme projet de gare a été gagné par un architecte. Malheureusement, cette visite a été annulée à cause du froid et remplacée par un atelier sur le Grand Paris piéton.
Cet atelier avait trois objectifs différents, explique Bruno : comprendre, imaginer et produire du sens. Je les ai vraiment vus à l’œuvre, ils ont vraiment bien collaboré. Le but de l’exercice était de les faire réfléchir sur le territoire et son potentiel piéton. Ils devaient donc concevoir un petit programme piéton pour le Grand Paris : quelque chose de réalisable, qui rentre dans une enveloppe financière réaliste, mais aussi rêvé. Ils devaient donc observer le territoire, le comprendre, et faire un diagnostic pour établir le potentiel de tel ou tel site, puis faire une proposition de projet. Il y avait deux groupes équilibrés qui ont sorti deux concepts très différents. Le premier a défini trois types d’utilisateurs : les parisiens, les banlieusards et les touristes. Le second groupe a pris l’exercice autrement : les parisiens qui vont dans la banlieue et les banlieusards qui vont dans Paris. Je dois dire que le résultat a été à la hauteur. Ils ont joué le jeu à fond et la présentation a été très vivante, avec beaucoup de couleurs et d’images. C’était chouette. Ils ont fait un plan au format A3 et ils ont dessiné dessus leur projet pour identifier les sections et les voies piétonnes, avec des légendes.
Quel est le projet commun sur lequel les élèves ont pu travailler ?
Une maquette collective a été réalisée par l’ensemble des élèves. Pour ce travail, les trois classes ont été mélangées.
Cette maquette a pour but de montrer toutes les mobilités du Grand Paris : le train, le métro, le vélo et les piétons, ainsi que toutes les zones de développement en construction. Il y a quatre programmes : les logements, les bureaux, les services et les commerces.
Bruno raconte : “J’étais seul à animer le projet pour une bonne cinquantaine d’élèves présents sur trois après-midis. L’objectif était de les faire parler à partir de la situation actuelle représentée sur la maquette.”
Les étudiants ont travaillé par binôme, chacun sur un support au format A3. Les supports n’étaient pas fixes : les élèves devaient se les faire passer pour que chaque binôme puisse apporter sa pierre à l’édifice. “Ce mode de fonctionnement les a un peu déstabilisés au début mais finalement ils s’y sont faits et se sont passés les supports pour que tout le monde participe. Les élèves étaient très contents et le résultat est vraiment à la hauteur” rapporte Bruno.
En bref
Ce séminaire d’une semaine complète a permis aux élèves de travailler sur un véritable projet d’urbanisme, à grande échelle, et situé sur leur territoire. Grâce aux visites et aux ateliers, ils ont pu appréhender les enjeux de ce chantier et travailler concrètement sur les problématiques qui se posent.